Pour Manutea, en théorie tout est sympathique et limpide, dans un style de rhum agricole -sans pouvoir
s’appeler comme ça, la faute à l’appellation- la canne monovariétale o’tahiti coupée manuellement, le vésou distillé rapidement, la réduction longue…
Le rhum est distillé en alambic surmonté d’une colonne (Arnold Holstein pour les puristes) et sort à 80%. On évite donc les grosses colonnes indus’ qui sortent de la quasi vodka à 92%, tant mieux pour -plus de- goût.
Manutea est dans un style purement agricole et la première chose qui nous vient à l’esprit, c’est l’irrésistible envie d’y ajouter une petite cuillère de bon sucre et un petit zeste de citron vert ! Un Ti Punch quoi ! Ou plutôt un Tahi’Ti Punch -marque déposée- !
Le clou du salon c’est sûrement la marque 100% Dugas qui se (re)lance dans l’embouteillage indépendant avec La Maison Du Rhum -toute ressemblance avec un possible concurrent est purement fortuite-. La Maison du Rhum ça sera au final 8 distilleries pour commencer, embouteillées à des degrés allant de 42 à 47 degrés. Voici le « line-up » qui envoie du lourd : Diplomatico, Maison la Mauny, Botran, Rivière du mat, Santa Lucia Distillers, Coloma, Damoiseau. Au final, la volonté de Dugas est de vous présenter une autre facette de ces distilleries en majorité connues de tous les amateurs. Le packaging est très travaillé, les étiquettes sont très belles, le prix devrait être modéré, les jus sont intéressants. 3000 bouteilles de chaque pour démarrer, de quoi avoir le temps de goûter sans se presser ! Un beau cadeau sous le sapin pour votre beau-père ? S’il ne boit pas de rhum, raison de plus, vous aurez un truc à boire en allant chez la belle famille, tout n’est pas perdu !
Toucan sort son N°4. Vous connaissez probablement la marque au Toucan dont le jus -rhum agricole of course- provient directement de Guyane française. L’oiseau se fait cette fois enfermer pendant 15 jours dans une cage de bois ayant contenu de l’armagnac, le temps de le dresser un peu le salopiau !
Bon, on l’a quand même un peu nourri avec des copeaux de chêne histoire de finir de l’assagir. Un bon rhum avec une recette maîtrisée.
Coloma le liquoriste spécialisé dans le café revient avec son 15 ans -un vrai 15 ans- qui a passé les 5 derniers mois de sa vie dans un fut ayant servi à faire vieillir leur liqueur de café.
Le café n’est pas prédominant au contraire, il ajoute quelques petites notes de torréfaction en trame de fond, le nez est gourmand sans agressivité.
On passe à Diplo, qui nous vient avec deux ingrédients utilisés pour la sauce vénézuélienne !
Impossible de ne pas passer par ce stand, modeste au demeurant contrairement au stand bariolé de Don Papa. Diplomatico souhaite jouer la carte du producteur et c’est tant mieux.
2 nouveaux rhums en édition limitée arrivent donc, deux distillations radicalement différentes qui participent donc en tant qu’ingrédients au Diplomatico que l’on connait tous, le « Reserva exclusiva ».
Comme quoi l’équipe recherche et développement ne se limitait pas au réglage du taux de sucre ! Je suis mauvaise langue ! Diplomatico nous offre donc une réponse probable à une levée de boucliers qui se fomentait chez les cavistes et consommateurs, demandeurs de nouveauté !
Le premier, un Single Batch Kettle est une distillation de miels de canne dans un Kettle Still, importé à la distillerie en 1959. Distillé en 2011, il a vieilli dans des fûts de bourbon, il évolue sur le registre aromatique assez puissant avec un nez type Foursquare ! Un coco et une vanille sur des notes assez droites, le nez est assez tendu. Une bouche assez sèche pour un Diplomatico avec un côté grain assez alcooleux.
Le second a été distillé à partir de mélasse en Mars 2013, dans une colonne Barbet faite de cuivre
également achetée aux Antilles françaises par la distillerie en 1959. Ce Barbet également vieilli en fût de bourbon est plus fruité, plus rond, plus « toffee » encore avec des saveurs lactées de lait de coco. Sa finale est plus longue que pour le Batch Kettle. Un léger feu sur les papilles qui contrebalance cet effet de rondeur.
Bilan, je préfère le Barbet, à mon sens mieux construit, plus souple, moins inégal entre nez et bouche que le Kettle Batch.
Les deux sont embouteillés à 5000 exemplaires chacun pour ce premier lot.
Trois Rivières avec son L23-206
En fait, il nous a suffi d’échanger quelques mots avec le charismatique et discret Daniel Baudin, maître de chai chez Trois Rivières et Maison La Mauny pour comprendre la signification de ces lettres et chiffres qui tatouent les dernières belles choses de chez 3R. « L23 » donc, cette lettre et ce nombre résonne dans bon nombre de caboches d’amateurs de rhum. En effet, l’an passé, Trois Rivières, avait embouteillé ce fameux L23. L23 signifie donc Loge 23, qui a abrité des fûts de 400L de chêne neuf américain ayant contenu un jus de millésime 2006, au degré naturel de 55,5%. Un franc succès, un goût de trop peu, embouteillé au format 50cl.
De retour dans cette Loge n°23, Daniel a décidé de s’attaquer de nouveau au millésime 2006 mais qui cette fois a passé sa vie en fut de cognac de 400L.
Nul doute que ça va rapidement devenir un bestseller !
Daniel passe ensuite un petit coup de plumeau sur le VSOP de Maison La Mauny, désormais constitué d’un assemblage d’un rhum vieux de 9 ans avec un autre rhum vieux de 5 ans et demi, et pour reprendre les propos de ce talentueux maître de chai « c’est de la douceur et du caractère ».
Rien de nouveau sous le soleil d’HSE sinon une belle déclinaison chromatique avec la possibilité de tout goûter, assez cool !
Enbrayons sur La Favorite, qui s’est un peu laissée dépasser par les
événements avec un Bel Air 2017 attendu mais malheureusement pas « dégustable » en version finale sur le stand. Cependant, la version qu’on a pu goûter est déjà très prometteuse, nul doute qu’avec une réduction lente comme prévue ça devrait être encore plus dingue ! Du fruit, du poivre, c’est attendu pour novembre, avec ceci ?
Que dire du millésime 2009, qui sera certainement à re-goûter car il ne nous a pas laissé un souvenir impérissable…
Les flibustes étaient réconfortantes comme à leur habitude, un bon rhum au coin du feu, voici quelques arômes trouvés lors de la dégustation :
Flibuste 1987 : Chaleureux, caramel, gourmand gras, caramel beurre salé
Flibuste 1988 : plus droit, floral, minérale, rancio
Allez, on finit par du japonais, Nine Leaves c’est cool !
Le blanc standard est cool, la finition en fut de cabernet est bien barrée, mais y a quand même des notes bien soufrées dans une des deux finitions disponibles.
Bilan
Suivez de près la nouvelle marque Dugas nommée La Maison Du Rhum qui promet de belles choses, partez faire un tour sur Tahiti, repassez par la Martinique et faites un coucou à Daniel Baudin puis rentrez à la maison !
Circuit alternatif : Aventurez-vous en trek en Amérique du sud armé de votre plus beau short commando et de votre verre de dégustation pour rajouter quelques bonnes petites choses comme Coloma !
Article écrit par Baptiste Bochet de Colada.fr